Nous aimons la Bretagne. Depuis longtemps. Nous y sommes tous allés, un jour. Pourquoi ? Sans doute quelque chose de différent de nos autres régions de France, qui nous a émus, par la beauté de ses côtes, la singularité de son langage, la simplicité de son peuple, fier et tanné par l’iode de l’océan. Parce que nous y avons des souvenirs d’enfant aussi. Tu crois ?

Alors pourquoi une « nouvelle campagne de communication » pour la Bretagne, déjà classée destination de vacances préférées des français ?

Elle est bonne une fois dedans

Humour breton. C’est ce que nous dit la responsable de la communication. Sympathie naturelle, séduction et blague dans le coin. Fallait-il parler de l’eau froide, des ciels plombés ou de la cornemuse celte pour nous rappeler ce qu’est la Bretagne pour le touriste de base ?

Partez touriste, revenez breton !

Ah non ! Je ne veux pas devenir breton. Je respecte trop la culture de chacun.e pour en faire mon étendard. Je suis un banlieusard. Je suis peut-être un touriste dans mes moments de consommation de ce qui m’éblouit, m’émerveille, m’expulse de mon quotidien, mais je sais encore qui je suis à l’intérieur. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi un breton voudrait que je me revendique de sa tribu, lorsque que je n’en ai ni les codes, ni la langue, ni le goût de la mer (sauf à imaginer les embruns sur ma tartine de beurre)…

Nous ne sommes pas bretons. Nous n’aimons pas non plus être considérés comme des touristes dans une réserve. Je parle beaucoup en ce moment de la responsabilité du marketing (et aussi de la communication). Elle commence par le respect de l’autre ; du breton comme du visiteur.

Attirer l’attention, faire sourire, jouer sur des mots, est-ce cela la communication ? Est-ce responsable ? A quoi cela sert-il ?

Je ne veux pas t’embarquer sur ces vagues de doute qui nous submergent parfois, mais tout de même, penses-y un peu. Quelle est l’utilité d’une campagne de publicité en version affichage pour nous vanter l’eau froide de la Bretagne ? Humour, dis-tu ? et après ?..

Comme je l’expliquais hier soir à un ambassadeur fidèle du marketing émotionnel, susciter de l’émotion est une évidence de toute communication, qui ne la rend pas responsable. Pas du tout ! C’est l’action qu’elle déclenche (éventuellement) qui doit être regardé sous l’angle de la responsabilité. Et cela commence par l’utilité. Est-il utile de parler de cette manière de la Bretagne ? Utile pour qui ? Pour l’agence qui vise un prix, pour la responsable de communication citée davantage qu’à l’habitude, pour celle ou celui qui a dépensé un budget régional comme l’an dernier, parce qu’il faut bien faire quelque chose sinon nous n’aurons plus de touristes (ahahah) ?

Utile aux bretons qui savent depuis longtemps que nous trouvons l’eau froide et le ciel trop changeant et que nous ne comprenons rien à leurs danses, leurs chansons ou leur passion pour le cidre (bon ok j’exagère, on peut boire du cidre ailleurs qu’à Quimper) ?

Utile aux parisiens, aux gens du Nord, aux gens du Sud, qui savent trouver en s’y promenant, cet air si différent, cette nature indomptable, cette incroyable odeur de crêperie ou de manteaux mouillés, ces mouettes rieuses et ses marins pêcheurs, ses bigoudènes qui heureusement ne bouffent pas du couscous, ses fêtes joyeuses comme le cul d’une vache ?

Je ne le crois pas. Cette campagne est inutile. Elle ne crée aucune valeur, aucune beauté. Pour personne, ou presque. C’est exactement pour cette raison qu’il faut adopter le Moins mais Mieux. Ne plus faire ce genre de choses, inutiles.

Aimer la Bretagne, c’est très bien, et cela peut être beau.

Etre breton aussi.

#lovefirst