Alors que Karine se rend chez son psy pour décrypter sa tendance croissante à relever tous les challenges qu’on lui propose pour affirmer sa visibilité, sa notoriété, et même sa popularité, je m’interroge sur les leçons à tirer de la volonté de chacun(e) de réussir sur ce réseau qu’Elon Musk voudrait détruire. Notre réussite sociale est-elle comptable ?

Allongé sur le sol dur de mon salon, je regarde le plafond. Méditation. ou consternation ?

Que faire de cette communauté qui ne réagit pas, ou pas assez à mes réflexions sur le marketing ? Comment expliquer, pourtant, qu’elle continue de croitre au fil de mes rencontres ou apparitions lors d’événements où se pressent les gens avides de tout savoir ?

Et si je me trompais sur l’inutilité des challenges ? Et s’ils étaient la porte ouverte vers la gloire populaire, le succès pour presque rien, la folie du partage ?

Je réfléchis Karine, à ce que tu pourrais faire, lorsque tu sortiras de chez ton psy, pour quitter cette spirale descendante qui accompagne tes écrits lumineux et emplis de sens comme de sensibilité ?

1 – L’intelligence artificielle nous submerge

Le constat n’est pas le mien seulement, mais nous en serions déjà à 50% des posts rédigés et propulsés par des outils IA. Un challenge crois-tu ? Impossible de lutter contre cette marée, ce glissement de terrain. Le dérèglement numérique nous engloutit. Face à ce mur qui non seulement nous enferme mais s’élève toujours plus haut pour nous cacher le ciel, la survie est dans l’humanisme. Le challenge est une compétition que nous devons refuser. Le mur est trop haut !

2 – Il y a chaque jour de nouveaux experts du post à like

Alors pourquoi pas toi ? Lis donc la trajectoire de celles et ceux qui s’obligent à poster chaque jour, chaque semaine, laborieusement ou pas et qui finalement disent toujours la même chose. Quelle folie ! Quelle drôle d’obsession ! Pourquoi ? Pour qui ? Et où est l’ambition sociale dans cela ? Te montrer à tous, être lu(e), admiré(e) ou critiqué(e) par des milliers de gens. Oh la la, tu sais j’ai fait déjà 1 million de vues ! C’est génial non ? Quand vas-tu exploser ?

3 – Dire ce que tu fais ne te permet pas dire aux autres ce qu’ils devraient faire

Ton psy t’écoute. Il a raison. Te dire quoi faire ne servirait à rien. C’est à toi de vivre, de choisir ta voie et d’avoir envie. Par moment, je tente de t’inciter à réfléchir, à prendre du recul. Mais tu fais ce que tu veux. Je le sais. Je ne prétends pas te donner de leçon. Ni t’imposer une morale ou une éthique qui ne seraient que les miennes. Je crains qu’à force de subir les leçons de yoga management, nous devenions parfaitement crétins. Faire comme les autres est ahurissant.

4 – La vacuité de tes actions du quotidien est précieuse.

Pourquoi voudrais tu nous raconter ce que tu vis ? Remplir le lave-vaisselle ou préparer des nouilles avec du fromage râpé, n’est pas intéressant et pourtant, tu le fais. Alors tu nous racontes ce que tu crois extraordinaire, et qui pourrait, devrait nous inspirer. Mais non ! Tu devrais garder ça pour toi. Ou alors le servir à tes amis lorsque tu t’ennuies dans le train… La vie n’est pas remplie d’extraordinaire. Qu’est-ce que tu ne comprends pas dans extraordinaire ? Cette propension à tout transformer en aventure géniale et à partager, me sidère.

5 – Calme toi et respire !

Tout cela ne te serait pas arrivé si tu laissais le temps passer. Ce que tu as oublié en t’inscrivant dans le challenge, c’est précisément le temps d’aimer. Or le temps d’aimer est un temps totalement différent de celui du challenge. Dans le challenge le temps t’est imposé. Et Linkedin joue avec ton temps, en le raccourcissant un peu plu à chaque changement d’algorithme. La roue tourne de plus en plus vite. Le temps d’aimer, lui, est le tien. Tu lui donne l’ampleur, l’élasticité que tu souhaites et qui tient compte de ton état émotionnel. Plus tu aimes, plus tu as le temps… pour toi.

Et voilà !

J’adore que tu me parles de ton lave-vaisselle, de ton chien, des arbres qui peuplent la forêt et de tant d’autres micro aventures qui te définissent… mais uniquement parce que je t’aime. Sinon, ça me saoule grave !

Et le challenge n’est pas d’être aimé par des milliers d’inconnus. Le challenge est d’aimer vraiment, une, deux ou quinze vraies personnes…

Et cerise de Groupama sur ton gâteau, personne ne te félicitera pour ça ! A part, celles et ceux que tu aimes…