J’ai écris ce texte sur Linkedin il y a 5 ans… oui 5 ans…
Pulse, tu connais ? Mais si tu sais, ce truc de Linkedin pour nous inciter à écrire du contenu de qualité qui augmente l’attractivité de la plateforme pour les auteurs de pacotille, les passionnés du commentaire égotrippé et autres adeptes du self love. Non je plaisante, ne pars pas ! Alors j’y retourne et je me relis. Ah mais c’était pas mal ce texte ! Autosatisfaction hyper bienvenue en ce premier jour où l’on retrouve le droit de sortir et de rencontrer des gens, et où je m’interroge sur les changements que cette catastrophe a introduits dans ma cervelle. Suis-je dans le doute ? Un questionnement est-il nécessaire ?
Le monde des marques aura-t-il encore besoin qu’on lui raconte des histoires ?
Pas de panique mon gars, depuis ce matin, tu as déjà reçu et accepté quelques sollicitations sans mettre le nez dehors. Tu es là, bien au chaud, et certains continuent de penser à toi. La vie est belle ! Oui mais pourquoi ? Comment est-ce possible alors même que je me refuse toujours à publier des photos de mon chat ou des derniers bouquins que je prétends avoir lus ou encore des radis qui commencent à pointer le bout de leur nez dans mon potager (tu me diras que si j’avais un chat, cela changerait peut-être quelque chose… tu y crois à cette histoire de radis…) ?
Je vais tenter de t’expliquer ma stratégie. Elle risque fort de te paraître basique, j’en mesure la possibilité et j’assume. J’écris et je publie depuis plus de 7 ans pour toi et pour toi seule.seul. Un truc de dingue non ? Avoue que tu n’y avais pas pensé ! Crise ou pas crise, je continue mon travail d’expression de ma passion pour le marketing, de mes réflexions, sans autre objectif (aïe un gros mot) que de t’en informer, afin d’enrichir ta conversation (si j’écris de nourrir ta réflexion tu vas me trouver prétentieux…). Je te délivre ce que je crois, ce qui m’inspire, ce qui me révolte, ce qui m’anime dans la valorisation d’un marketing que je souhaite romantique en toute générosité. Avec la même persévérance, je maintiens autant que possible le fil des relations que j’ai eu avec mes clients, avec certains partenaires et beaucoup de lectrices.teurs comme toi, par amour et par fidélité.
Et tu en tires quoi, me murmure à l’oreille, non pas cette jolie russe qui a réussi à séduire Malotru comme avant elle une syrienne non moins magnifique, mais bien la troupe envahissante de ceux qui ne jurent que par leur ROI. J’en suis heureux. Simplement. Quand je lis un commentaire, quand je vois quelqu’un partager tel ou tel article de mon blog, je me sens utile à ma communauté. Cette quête de sens que chacun appel de ses vœux, notamment en sortie de crise, est là, avec moi, dans mon quotidien. Mais ce n’est pas tout, et c’est tant mieux, parce que tu t’en fous un peu de mon bonheur non ? Ce que toi, tu pourrais obtenir comme résultat, si toutefois tu considères que c’en est un, en publiant pour les autres et non pas pour toi, ou ta marque, c’est la gratitude.
OMG le mot est lâché ! Gratitude ? La gratitude est un sentiment et non une rétribution comme peut l’être la reconnaissance (cf le Littré « La gratitude indique donc plutôt le sentiment personnel de celui qui est obligé »). D’où ma réticence à considérer qu’elle peut être un résultat (que l’on imagine trop vite comme un bénéfice au sens financier du terme). Ce sentiment qui naît chez ma lectrice / mon lecteur, mon contact, est précieux à mes yeux et à mon cœur. Il est moteur de ma plume, de mon agitation cérébrale et mieux encore de mon évolution intellectuelle. Sans cette gratitude, j’ai le sentiment que mes efforts seraient vains, que ma motivation s’évanouirait aussi vite que Cendrillon à la vue de son prince, et que j’en serais figé dans la posture aigre de ceux qui ont des certitudes et qui ne les quittent pas. Tu comprends ici à quel point cela est essentiel pour une marque, et donc pour toi aussi, de comprendre l’implication, le lien de cause à effet. Agir pour les autres génère une gratitude qui nous est indispensable à toi, comme à nous tous, les êtres humains. C’est le progrès !
Il y a un deuxième point qui va t’interpeler : la gratitude ne subit pas la crise ! N’est-ce pas une bonne nouvelle ? Tu peux tout remettre en cause en période de crise, et particulièrement ta relation client, au sens du business, mais pas la gratitude. Ce sentiment est né chez celui qui a appris, découvert, été émerveillé par ton ou tes contenus, tes interventions, ici ou là. Or ce sentiment ne disparait pas, il est fixé dans sa mémoire pour longtemps (je n’écris pas pour toujours mais c’est assez probable). Souviens-toi, chaque fois que tu as appris ou découvert quelque chose, dans ta vie, ce qui pourrait pourtant être le cas tous les jours, tu as mémorisé celle ou celui qui t’a procuré ce plaisir. Ton cerveau le fait pour toi, et inconsciemment tu développes alors, un lien affectif qui ne s’effacera pas, ou pas avant un temps long. Aussi, lorsque la démarche éditoriale de la marque ou de l’entreprise ne subit pas de variations en fonction des saisons ou des crises passagères, il n’y a aucune raison pour que le « niveau de gratitude » soit touché, pas davantage que la fidélité des clients. Pour tout dire, je pense même que c’est l’effet contraire qui se manifeste. L’idée du phare dans la tempête, comme une évidence que l’on sait qu’il est là tout le temps, par tous les temps et qu’il est normal de le voir dans les pires conditions.
Plus tard, bien plus tard, quand le marketing aura repris le cours de sa vie dans l’entreprise et qu’on lui demandera à nouveau de fournir des leads aux commerciaux, ou de créer du trafic en point de vente, tu reliras ces mots, et tu t’apercevras qu’ils n’ont pas vieilli (eux et pas leur auteur). Ta gratitude, pour peu qu’elle existe, n’aura en rien été modifiée par le temps écoulé.
J’aimerais assez que cette force de la constance dans le temps, soit un enseignement pour nous tous qui devons valoriser une marque (au sens de lui donner de la valeur). La gratitude est un vrai résultat, certes peu mesurable, mais tellement précieux dans les moments de doute. Pouvoir compter sur ceux qui sont là, quelque part, peu prévisibles, mais constants dans leur affection positive à notre égard, est un capital énorme. Le jour où nous sortons la tête des nuages, le jour où nous regardons l’horizon sans trop comprendre de quoi il sera fait, sentir leur présence, savoir leur attention, leur soutien, ne peut que nous rassurer. Certes ce n’est pas strictement suffisant, au sens du business, et comme les applaudissements au balcon, cela ne fera pas rentrer des sous dans la caisse tout de suite, mais pourquoi pas demain.
Car cette gratitude se transforme un jour en recommandation, en influence différée. Quand n’est pas une question. Elle se véhicule d’une conversation à l’autre et revient vers vous, sans raison, sans prévenir. Pour celles ou ceux qui ne croient plus à l’Inbound Marketing, j’y vois comme un rappel à l’ordre. Si vous cessez de croire en cette dimension humaine de la recommandation gratuite, alors vous allez progressivement ou brutalement réinvestir vos efforts vers des publications (y compris payantes) pour parler de vous, et pour tenter de convaincre que votre marque est la meilleure. Or vos clients le savent déjà, vous ne leur apprenez rien en le disant, et les autres ne vous croyaient pas hier, pourquoi le feraient-ils aujourd’hui ? La crise vous aurait changé en mieux ? C’est possible mais sont-ils prêts à le croire ? Alors qu’en définitive, vous auriez dû continuer à écrire, à prendre la parole pour eux et pour eux seulement.
C’est tellement plus facile d’écrire pour soi. On peut le faire tranquilou gilou, sur un coin de table, à l’arrière d’un taxi ou sur le banc d’un square rendu au silence par la rentrée des classes, rien de plus simple que de se faire plaisir en parlant pour soi d’abord. On s’auto-convainc, on s’auto-congratule au passage, sans oublier de s’auto-citer, ce qui donne un peu plus de légitimité pour soi-même. Ah quelle belle idée ! En prime, si nous écrivions quelque texte de très peu d’intérêt, cela n’aurait aucune importance puisque nous en serions la seule victime ! Aucun risque de décevoir, sauf à être masochiste, et à faire exprès d’être mauvais. Voudrais-tu un exemple ? Leroy Merlin (une marque que j’aime pourtant pour son expérience client remarquable), annonce en format publicité qu’il est temps que nous nous occupions de nos maisons, elles qui nous ont abrités loin du virus pendant 2 mois, et que donc, les magasins sont réouverts. C’est affligeant ! Crois-tu vraiment que si j’aime cette marque, j’ai besoin que l’on m’annonce l’ouverture des magasins ? Que l’on m’incite à y retourner pour enfin prendre de soin de chez moi ?… A moins que cela ne s’adresse qu’à Leroy Merlin, je trouve cette prise de parole inutile. Pas toi ?
Tu vois comme tu es, chère lectrice.teur ! Je croyais pouvoir écrire pour moi, et finalement je n’y parviens pas, sous la pression continue de ton attention… Pfff, tu exagères ! Je te sens là, prêt.e à bondir et à m’envoyer paitre dans un de ces commentaires dont tu as le secret !Tu le sais, je t’aime pour ça aussi !
Pas grave ! Promis, un jour, quand je serai grand, j’écrirai pour moi ! Ce jour là, tu seras déçu.e, j’en suis presque certain. Alors d’ici là, restons proches, et laisse-moi te remercier encore une fois pour tout ce que tu as déjà fait pour moi.
Je t’embrasse !


Waouh un texte magnifique Patrice, bouleversant, si sensible ! J’adorerais écrire, pas que pour moi. Même si je trouve que déjà cette démarche n’est pas simple. Pare qu’écrire pour soi signifie également lecture, relecture, avis négatif puis pourquoi pas, déchirer les pages… Pour se dire que finalement, on n’aurait peut-être pas dû… Alors merci pour tes mots Patrice, sur Linkedin et ailleurs et ton engagement vers un Marketing toujours plus émotionnel !
Merci Juliette ! Un commentaire bien agréable à lire et à recevoir ici… Ecrire demande un peu d’abandon de soi, et Dieu sait que je n’aime pas ce mot d’abandon… mais c’est aussi le côté plaisir de se laisser porter par les mots qu’il convient de cultiver jour après jour… alors vient le moment de se relire, plus tard, avec indulgence pour laisser gagner l’émotion et ressentir à nouveau un léger souffle de vie.