Dans un récent article dont il est féru, Nicolas Bordas prend appui sur le désastre Tesla pour alerter les dirigeants sur l’importance de la valeur de marque, qu’il s’agisse de la marque corporate comme de la marque commerciale. Car ce qui se vit bien à l’intérieur, s’exprime d’autant mieux à l’extérieur. Avec comme corollaire inverse que la moindre défaillance à l’intérieur, et en particulier au sommet, peut s’avérer catastrophique pour la valeur perçue par les publics extérieurs (et en premier lieu les clients).
Dans l’exemple de Tesla, les propos et choix politiques clairement revendiqués par Elon Musk, sont des signaux trop forts pour être ignorés. Aujourd’hui, une vague de protestation mais surtout de dégout exprimé envers la marque la plus commerciale qui lui est associée, provoque une chute lourde et brutale des ventes de voitures Tesla partout dans le monde, y compris aux USA. On a là un cas extrême de défiance collective dont l’ampleur est à l’image (inversée) du fanatisme positif qui a conduit ce constructeur sur la plus haute marche du podium pendant la derrière décennie. Plus on aime fort, plus la chute est profonde !
Qui a dit que ce serait facile ?
Par habitude, les entreprises construisent d’abord une offre, un MVP (minimum valuable product), avant de penser à la marque qui la portera au monde. C’est évidemment plus difficile une fois lancé sur un marché, une fois les premières commandes enregistrées, ou les premiers commerciaux sur la route du succès. Tout à coup, il s’agit de donner des valeurs à une marque inconnue, et pourtant déjà dans la conversation. Sans tarder, l’entreprise va se doter d’un beau discours de marque, de quelques valeurs passe-partout et d’une sorte de feuille de route manifeste à destination de son équipe de joyeux collaborateurs au sourire aussi large qu’un pétrolier navigant en mer du Nord.
Bientôt on s’attachera à communiquer plus encore. On produira des contenus en quantité, parce que c’est ainsi que l’on gagne en visibilité de nos jours dictés par les algorithmes googlesques. Enfin, pas pour longtemps, alors autant démarrer une content factory nourrie à l’IA, pour prendre place dans la longue traine des moteurs de recherche. Naturellement, si le dieu des levées de fond est avec nous, nous aurons de quoi envahir les quais du métro parisien avec des affiches concrétisant votre entrée dans le business des grands.

Bref ! et la marque dans tout cela ?
La marque commerciale dont parle Nicolas, est celle que nous avons choisi comme repère dans nos vies, comme lien social nous rattachant à la communauté de celles et ceux qui la préfèrent à d’autres, et comme affirmation de notre identité individuelle dans un monde globalisé. Tu vas chez Lidl toi ? n’est plus une invective désagréable, c’est davantage une marque de respect.
Alors quand les salariés de la même enseigne, ou le patron d’une célèbre marque de centre d’épilation se met à protester contre les conditions de travail ou à contester des critiques fondées, le client change plus vite que l’on peut le prévoir. Toutes les digues sautent à la fois. La marée submerge bientôt les media sociaux ou non, et la marque est dangereusement déstabilisée. Que vaut-elle dans cette tempête ? Tout se déroule comme si s’agissait d’un reflux venant salir le sable blond de l’insouciance. Une pollution noire et gluante.
Aucune trahison ne nous laisse intacte.
Lorsque la marque définit sa stratégie, elle s’engage. Pour longtemps. Elle doit alors tenir cet engagement, en respectant ses valeurs, dans chacune de ces offres. Construire une offre sans prendre en compte la marque est une erreur grossière. Une erreur que le client détecte aussi vite qu’il est prêt à déposer un avis zéro étoile lorsqu’il est déçu. L’offre qui ne correspond pas à la marque, aura aucune chance dans un marché concurrentielle. Elle passe même inaperçue tant elle est décalée par rapport à ce confort intellectuel que procure l’acceptation de la marque. Si j’aime la marque, j’aime aussi ce qu’elle produit. Tant que les valeurs qu’elle affiche se retrouvent aussi dans sa vie d’entreprise. La marque corporate qui nous promet la pureté de l’eau des montagnes ne peut pas tricher sur sa capacité à être transparente. Certaines eaux supposées minérales ont subi les foudres médiatiques et protestataires pour avoir été floues, pour ne pas dire obscures.
Si ma marque promet l’excellence, est-elle excellente vue de l’intérieur ?
C’est aussi pour cette raison que la marque se construit sur des convictions, des visions du monde, pérennes. Il n’est pas question de dévier de la trajectoire toutes les semaines ou au gré des offres qui sortent de l’imagination des gens de la R&D. La marque est un phare. La marque nous rassemble, nous ses clients, ses ambassadeurs. C’est sa force, relative à sa valeur qui nous inspire dans nos quotidiens. Plus elle a de la valeur, plus nous sommes ses clients.
Il appartient aux dirigeants, aux managers de créer les conditions du rayonnement de leur marque à l’intérieur comme à l’extérieur. Et si j’avais une priorité à te proposer, ce serait, à ta grande surprise, de commencer par définir ce qu’est la marque corporate, avant d’imaginer son équivalent commerciale. Tu mes suis Nicolas ?
#riendautre

