cinéma et émotions
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Ce que veulent les clients ?

C’est la préoccupation de tous les services marketing du monde : deviner ce qu’il se passe dans la tête de leurs clients. Pourquoi achètent-ils et surtout pourquoi pas ? Leurs choix, leurs décisions d’achat sont-il dictés par le passé ? Comment déduire de leurs comportements d’hier, leur préférences pour demain ?

Alors me revient en mémoire, certaines discussions avec Jean ou Anne, pour dire ma conviction que l’humain est imprévisible. Que toutes les statistiques imaginables ne réussiront pas à me transformer en cible idéale pour telle ou telle marque. Que pourtant, mes expériences me guident continuellement au moment de m’orienter, de m’inciter à renouveler ce qui me fait plaisir.

Et puis je lis Charles Pépin.

« Bien souvent nos souvenirs sont flous, voire dissimulés, enfouis profondément dans des limbes de notre mémoire. Ce qui nous revient, c’est une sensation proche de celle que nous vivons et une émotion liée. Le sentiment nous étreint, mais il est fugace. Si nous n’y prêtons pas attention, il a tôt fait de passer, et ne nous reste que l’instant présent, nu, appauvri. Déjà, à la deuxième puis à la troisième gorgée, l’émotion, la félicité intense qui a étreint Proust est amoindrie. »

Note : Il s’agit ici d’analyser le pouvoir de la madeleine de Marcel

« Le phénomène et son mystère sont en train de lui échapper. Il doit se concentrer sur cette première gorgée et, par un effort de volonté, remonter le fil de la manifestation intérieure qui l’a saisi. Mais l’esprit est rétif et plein de méandres, de fausses routes et de vois sans issues. Alors Proust use de stratagème avec lui-même, il se laisse distraire, fait retomber la tension, puis se replace face au phénomène, à cette sensation particulière, et reprend son cheminement. Et peu à peu, une voie s’ouvre, quelque chose vers la conscience, prend forme. C’est le souvenir qui se reconstitue sous son regard intérieur attentif. Il revit l’épisode de Combray et toute la joie associée à cette période de sa vie d’enfant. Ainsi, il peut suffire d’une sensation particulière pour faire renaître une émotion passée, associée à cette impression des sens dont on a perdu la trace. Mais il faudra un effort conscient et un travail attentif de dévoilement pour renouer avec toute la substance du souvenir et en jouir pleinement. Quelle récompense alors de revivre ces joies passées à travers une chose aussi simple qu’un morceau de madeleine trempé dans le thé ! Oui, la perception semble bien en effet, comme l’a écrit Bergson, d’ailleurs contemporain de Proust, « imprégnée de souvenirs« .

Dès lors, suffirait-il de savoir quels sont les sensations, les perceptions inconscientes qui déclenchent en nous, la volonté du souvenir, pour nous inciter à acheter ? Serions-nous définis par votre passé et donc, par nos souvenirs ?

Une idée serait d’enregistrer nos souvenirs dans la base de données client, afin de mieux les re déclencher en jouant sur les sensations associées. Oui mais alors, il faudrait commencer par arrêter de croire que mes achats sont réfléchis et répondent à une analyse rationnelle de mes besoins. C’est davantage le désir de revivre des sensations associées à des souvenirs heureux qui me motive lors de mes séances de shopping. Tu ne crois pas ?

Et même ce que nous appelons désir d’appartenance à une communauté est sans doute reliée à cette accumulation de souvenirs auxquels nous souhaitons tout à coup avoir, de nouveau, accès. Le plus intrigant dans le fonctionnement de notre mémoire, c’est la capacité que nous avons à la modifier au fil des ans. Nous sommes capables de recoder le souvenir, différemment, en fonction de notre propre évolution, de notre perception de notre moi actuel. Ainsi une expérience heureuse hier, peut devenir bien plus quelconque aujourd’hui, non pas qu’elle est changée entre temps, mais parce que notre référentiel n’est plus le même. Ce qui valait 4 étoiles dans un contexte précis, ne les vaudra plus lorsque nous rappèlerons le souvenir des années plus tard, et inversement.

Ce que veulent les clients dépend donc de leurs souvenirs. Et plus compliqué encore, dépend de leur volonté de faire appel à ces souvenirs, sans trop les déformer, au moment d’envisager une nouvel expérience, un nouveau choix.

En lisant cela, j’espère que tu réaliseras combien il est illusoire d’investir des fortunes pour modéliser les historiques clients afin d’en tirer des prévisions. Il dépend de chacun de vivre positivement son passé et de s’appuyer sur ses souvenirs pour améliorer ses expériences.

#MerciProust #MerciPépin

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CEO Eforbrands Consultant / Speaker / Formateur / Auteur du Marketing Emotionnel Fondateur du Club du Marketing Emotionnel - Intervenant pour les MSc MBA Inseec Paris et l'ISCOM en marketing émotionnel, stratégies de fidélisation, relation client... Auteur des livres : Tout savoir sur Le Marketing Emotionnel aux Editions Kawa - nov 2013 La Fidélité, du chaos à la zone de confort aux Editions Kawa - Janv 2017 Marketing ZERO avec Philippe Guiheneuc, chez 1min30 publishing - juin 2021 Fondateur de Eforbrands et de LePartenariat Rédacteur du blog marketingemotionnel.com

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