Déjà se pose la question du souvenir : qui se souvient de lui aujourd’hui ? Le cowboy hollywoodien par excellence. Rassurant, sympathique, et parfois même ivrogne. Irlandais d’origine. Une version présentable dans la famille de ce héros tanné par le vent et le soleil qui manie colt ou winchester avec dextérité et confiance.
J’aurai adoré être un cowboy. Mais non. J’ai fait du marketing…
Pourquoi ? Pourquoi je ne suis pas John sur son cheval, ou accoudé au bar, ébloui par la femme qui passe, jouant au poker ou arborant son étoile de shérif pour faire la loi dans un village poussiéreux au bord du Rio Grande ?

John n’est pas un gentil
D’abord, dans la société dans laquelle je vis, on ne tire pas sur les gens avec un colt lorsqu’ils ne sont pas d’accord avec vous. Et c’est dommage ! Oups… pardon, c’est mieux comme ça… John ne se laisse pas marcher sur les pieds. John prend l’espace des grandes plaines, fonce vers le soleil couchant et est bien vite loin des conversations de cocktail du monde de la com…. Comme il a raison !
Ici, dans le monde du marketing, tu te dois de respecter la majorité bien-pensante. Même lorsque tu trimballes dans tes sacoches en cuir limé, une vision romantique du marketing, on te fait comprendre que seul le résultat compte. Pire encore, on te raille comme le dernier spécimen de bisounours bientôt menacé de disparition. Passe moi ton colt John ! Le troupeau passe lentement et traverse le guet comme il abandonne un outil pour un autre. Fascinante marche vers le précipice que seul le cowboy aguerri pourrait éviter.
Et pourtant. Chaque mois, une marque que nous pensions inscrite au patrimoine de la consommation , disparait sans laisser de trace, foudroyée par une absence totale de vision. Tu vois sur la vitrine du Go Sport des Halles cette mention du « tout doit disparaître avant changement d’enseigne » et tu repenses à cet exemple d’un marketing pitoyable que tu exposais il y a au moins 10 ans. Qui voudrait gagner une paire de chaussettes pour son anniversaire en échange de points patiemment cumulés au cours de plusieurs achats ?
Tu imagines John. Il est là au milieu de la rue, prêt à dégainer. Il entrevoit le chapeau de GoSport qui dépasse du mur arrière du saloon, et d’un seul coup, sans hésiter une seconde de trop, lui tire en peine tête. Wahou ! C’est ça le western. Pas de place pour les médiocres !

John a un cheval
Tu me diras que Don Quichotte aussi. Oui mais John ne combat pas les moulins à vent. Son cheval c’est sa liberté. Il galope d’un grand canyon à l’autre, il traverse la Monument Valley sans même se retourner. Son cheval le fait voyager, le sauve des dangers, le porte vers l’horizon qu’il voit de plus haut. Le cheval de John est beau, puissant, rapide ou fatigué, protecteur et sur de ses pas. Il est surtout fidèle jusqu’au bout de l’aventure.
Pourrait-on en dire autant des marques ? Et des marketers ? Ne sont-ils pas destinés à changer de monture dès qu’un nuage un peu trop sombre vient ternir le paysage ? L’entreprise d’aujourd’hui, plongée dans des crises de non croissance, devrait penser le marketing comme le cheval de John. Pour moi qui passe ma vie, mes jours à défendre les marques, cette absence de confiance, de fidélité dans le marketing est le plus grand préjudice que s’inflige le dirigeant. Sans un marketing inspiré, il n’ira pas bien loin.
Tu le sais, John n’a pas peur de voir loin, de dépasser les collines, les vallées hostiles, d’affronter l’inconnu. C’est parce qu’il a confiance dans sa monture, qu’il avance avec la force de celui qui espère quelle meilleur est encore à venir.

John a toujours des ennemis
Ce qui est fascinant dans les personnages qu’incarne John, c’est qu’à un moment ou à un autre, un ennemi se dresse sur son chemin. Toujours. Un mais souvent plusieurs. Indiens, hors la loi, rival, gangster, ils sont nombreux à vouloir sa peau, son scalp.
Soit rassuré, je n’en suis pas là. Et le marketing ? Là on peut en discuter, tant cette discipline est décriée. Mais pas au point d’organiser une chasse à l’homme, restons calmes. D’ailleurs, s’il m’arrive de critiquer, de me moquer de certaines campagnes de communication ou certains concepts marketing, ce n’est pas pour me faire des ennemis, mais, bien au contraire, pour créer le débat avec qui voudra. John, est rarement dans le débat. Il n’a pas le temps, et le plus souvent son ennemi se montre très vindicatif.
C’est sans doute dommage, mais dans le monde du marketing, la règle est de trouver toutes les idées… bonnes. Pourquoi ?
John est écolo
Tu peux me dire que ce n’est pas la même époque et qu’il n’y a ni voiture, ni avion, ni internet pour se rendre à la plage, au ski ou regarder Netflix. Mais le comportement de John est déjà responsable : il n’est pas orienté vers l’accumulation !
Ces besoins sont basiques et il est heureux de les satisfaire. Sans plus. Sans chercher sans cesse à en avoir davantage. Même son caractère, ses comportements sont d’une sincère simplicité. Pas de crise de la quarantaine, ni de recherche d’un why salvateur justifiant qu’il change de job, pas non plus de subite envie d’aller parler aux arbres ou de protéger les écureuils.
John est dans l’utilité du geste. Rien d autre. Ce qui n’est hélas pas le cas du marketer qui vise le ROI : combien tu rapportes en plus et coûte que coûte ? John au contraire ne fait rien qui ne serve à rien pour lui et la société…
Plus responsable qu’ecolo, il est toujours partie prenante de la nature. Il est la nature.
John Wayne serait effondré de nous voir tenter de convaincre des consommateurs perdus d’acheter un 20eme sac à main…
Moi aussi ! Et toi ?
En attendant John, tu peux revoir quelques uns des chefs d’œuvre qui ont jalonné sa carrière d’acteur hollywoodien :
La rivière rouge
La prisonnière du désert
Rio Grande
Rio Bravo
L’homme tranquille
La chevauchée fantastique
Alamo (qu’il a réalisé lui-même)
L’homme qui a tué Liberty Valance
La conquête de l’Ouest
100 dollars pour un shérif… etc…

