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Stratégie marketing : comment choisir entre JPG et Office Dépôt ?

JPG vs Office Depot

Il est un marché qui a pris cher avec notre préférence pour l’expérience Amazon : celui des fournitures de bureau. Souviens-toi Barbara, avant, tu feuilletais le catalogue de JPG et tu passais une commande de trombones et de stylo-bic, pour la boîte, en fantasmant déjà sur ce magnifique et ridicule poste de radio miniature, qui te permettrait d’écouter les histoires de Pierre Bellemare, à la pause d’après la cantine. Comme c’était le bon temps !

Fin du rêve. La récré est terminée et tu dois désormais, soit te rendre à la boutique Office Dépôt, à 800 mètres du bureau, soit commander en ligne tes ramettes de papier. 

Alors quelle est la stratégie marketing qui va sauver l’une de ces deux marques en péril ?

Avant tout, quel est leur positionnement actuel (ou plutôt avant le changement de nom de JPG en MondOffice, puisque RAJA a racheté les 2 marques et tente une rationalisation européenne) ?

Pour commencer, rappelons que JPG ne vend pas des ramettes de papier, JPG vend de la reconnaissance.

Derrière cette affirmation, il y a la volonté de comprendre la personne qui commande chez JPG est souvent une assistante, un office manager ou un patron de TPE. Pour cette personne, commander des fournitures est une tâche ingrate, répétitive et invisible. Si tout va bien, personne ne lui dit merci. S’il manque des stylos, tout le monde râle.

Et donc, JPG lui promet un beau cadeau qui n’est pas perçu comme une simple « promotion », mais bien comme un salaire émotionnel.

Ainsi quand l’assistante reçoit la cafetière, le set de bagages ou la enceinte Bluetooth offerte avec la commande, c’est une gratification personnelle immédiate pour une tâche professionnelle ennuyeuse. Une forme de syndrome du « Kinder Surprise pour adultes ». L’excitation à l’ouverture du colis JPG (qui contient souvent des bonbons Haribo en plus) crée une addiction positive.

Incontournable, le catalogue papier de JPG a toujours été traité comme un magazine de loisirs, avec des couleurs vives, des mises en scène ludiques et un ton complice. On le feuillette pour voir le cadeau du mois, pas pour voir le prix du toner.

On aime JPG, parce qu’il est gentil !

De son côté, en face de cette concurrence portée sur l’émotion, Office Dépôt ne vend pas des produits, Office Dépôt vend de la tranquillité d’esprit.

Cette fois, l’interlocuteur est souvent un Acheteur professionnel, un directeur financier ou un gestionnaire de services généraux. Pour lui, la fourniture est un centre de coût qu’il faut optimiser. L’émotion est l’ennemie ; elle est suspecte de cacher des coûts cachés.

Le discours de la marque est au contraire celui de la rationalisation : « Consolidez vos achats chez nous pour baisser vos coûts administratifs ».

Pour rassurer, pour obtenir le choix, Office Dépôt dit « Regardez, nous avons le stock suffisant pour équiper vos 50 filiales demain ».

Alors pourquoi dès 2026, JPG (France) devrait-il abandonner celles et ceux qui l’aiment encore pour devenir MondOffice (marque leader en Italie, également propriété de RAJA).

On peut trouver plusieurs justifications, sans doute un peu complaisantes, à ce choix :

  1. Economique : créer une marque propre « MondOffice » distribuée dans trois pays (France, Italie, Espagne) permet de commander des volumes colossaux aux fabricants et d’améliorer les marges face à des géants comme Amazon Business.
  • Modernisation sémantique : « JPG » est un acronyme vieillissant (les initiales du fondateur Jean-Pierre Giraud). « MondOffice » évoque un univers (« Le Monde du Bureau »), ce qui est plus descriptif pour une marque qui vend désormais du mobilier, de la technologie et de l’hygiène, et plus seulement du papier.

Ce rebranding est peut-être financièrement intelligent mais il est surtout émotionnellement dangereux. Il faudrait pour le réussir, injecter l’ADN « sourire » de JPG dans la coquille « MondOffice ». Est-ce seulement possible ?

Quand à Office Dépôt, coincée entre une évolution digitale et la présence en physique de magasin aussi agréables qu’un couloir de la ligne 9, comment croire que la marque peut encore nous séduire. Une stratégie défensive, en s’appuyant sur la qualité, le service et une certaine proximité, sont des atouts sans doute un peu faibles mais résistants. Dans l’idéal, il y a peut-être matière à se rapprocher des enjeux des clients : faire exister l’humain dans les décisions d’achat d’une entreprise, avant que l’IA ne décide de tout. Pourquoi pas ?

Résumé du positionnement comparatif des deux marques :

Les deux marques s’adressent au B2B mais avec des approches psychologiques et des segmentations différentes.

AxeJPGOffice Dépôt
ADN de MarqueLa proximité et le plaisir. JPG se positionne comme le partenaire « sympathique » et humain. L’accent est mis sur la relation client et la bonne humeur (slogan historique « Le sourire en plus »).L’efficacité et la puissance. Une image plus corporate, internationale et axée sur la performance (« Taking Care of Business »). C’est le « One-stop-shop » efficace.
Cible PrioritaireTPE / PME / Professions libérales. Cœur de cible très fort sur les structures de moins de 50 salariés qui cherchent du service et de la considération.Moyennes et Grandes Entreprises (GE) + Retail. Historiquement plus fort sur les grands comptes (via contrats cadres) et le grand public (via les magasins physiques).
Proposition de Valeur« Tout pour le bureau avec le sourire ». Une offre généraliste enrichie par une expérience d’achat ludique.« Solutions complètes pour l’espace de travail ». Une offre large incluant tech, mobilier complexe et services d’impression.

Engagement RSE et choix du digital : un fragile équilibre pour les 2 marques.

Sous l’impulsion du groupe RAJA pour JPG et désormais Viking/Office Depot Europe, les deux marques convergent vers une digitalisation responsable.

  • RSE (Responsabilité Sociétale) :
    • JPG a pris une avance notable en intégrant la RSE dans son storytelling (« zéro déchet », produits recyclés). L’appartenance à RAJA (très engagé via la Fondation RAJA) renforce cette crédibilité.
    • Office Dépôt tente de rattraper ce retard en « verdissant » son image, souvent perçue comme trop industrielle, en mettant en avant des gammes « earth conscious ».
  • Expérience Digitale :
    • Les deux acteurs investissent massivement dans l’e-procurement (faciliter les commandes pour les entreprises : validation de panier, gestion multi-sites).
    • JPG excelle dans l’UX (expérience utilisateur) pour les petites commandes rapides.
    • Office Dépôt excelle dans les fonctionnalités B2B complexes (gestion de budget par service, reporting).

Un marché compliqué sur lequel l’existence de marques traditionnelles est remise en cause, tant la transformation digitale a trop tardé et tant la valeur de la marque est faible face aux enjeux de rationalisation des coûts. Comment y échapper ? Comment s’en sortir ?

Et si l’émotionnel était la seule voie ?

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CEO Eforbrands Consultant / Speaker / Formateur / Auteur du Marketing Emotionnel Fondateur du Club du Marketing Emotionnel - Intervenant pour les MSc MBA Inseec Paris et l'ISCOM en marketing émotionnel, stratégies de fidélisation, relation client... Auteur des livres : Tout savoir sur Le Marketing Emotionnel aux Editions Kawa - nov 2013 La Fidélité, du chaos à la zone de confort aux Editions Kawa - Janv 2017 Marketing ZERO avec Philippe Guiheneuc, chez 1min30 publishing - juin 2021 Fondateur de Eforbrands et de LePartenariat Rédacteur du blog marketingemotionnel.com

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