C’est pour toi Gabriel ! En réponse à cet article très intéressant et témoin des interrogations existentielles de nos camarades de jeu, qui pose en effet la question de l’utilité pour le développement de business du marketing : lire ici l’article publié par 1min30 qui propose une synthèse des conversations initiée sur LinkedIn.
Mais de quel marketing parlez-vous ? Ce fut ma première réaction et en lisant les commentaires issus pour l’essentiel de gens qui ne font pas ou peu de marketing, je me suis dit qu’il était urgent de reposer les choses… Vraiment ? Apparemment le marketing dont on parle encore dans cet article se résume dans quelques préjugés du type : le marketing n’est qu’une manipulation des clients, le marketing c’est du vent, le marketing c’est possible si « c’est pour augmenter mon chiffres d’affaires » et autres balivernes du genre… Je n’ai guère envie de polémiquer tant je pratique et j’enseigne le marketing par passion depuis si longtemps. Je le fais parce que j’aime l’idée que ma vision du marketing peut changer les marques, et améliorer la vie de leurs clients. J’en ai fait aussi pour aider des entreprises à vendre leurs produits, évidemment. J’ai conseillé des marques grand public (alimentaire, services, automobile, pharmacie, etc) mais aussi BtoB y compris industriels. Je ne suis pas un vendeur, que ce soit clair. Je ne vends rien depuis que je ne suis plus le premier représentant d’une agence de marketing (la mienne le plus souvent).
Alors à quoi sert le marketing ? J’ai envie de répondre utile à qui ? Et c’est là que je vais perdre l’attention de mes lecteurs.trices. Comment à ça utile à qui ? A l’entreprise bien sûr !! me répondra -t-on avec insistance. Ce qui me semble étrange, cher Gabriel (@GDabiSchwebel ), c’est que les mêmes consultants que j’entends promouvoir la fameuse symétrie des attentions, ne comprennent pas que le marketing doit d’abord créer de la valeur pour le client. La résultat attendu par l’entreprise restera le résultat, c’est-à-dire une conséquence d’une décision prise par un individu indépendant et libre de tout engagement avec l’entreprise en question. Si je démontre l’utilité du marketing pour le client, alors il deviendra de fait, utile à l’entreprise, en ce sens que les clients ne veulent plus acheter sans savoir pourquoi ; pourquoi cela changerait-il quelque chose à leur vie ?
Pourtant il faut encore convaincre que les consommateurs n’achètent plus des produits, mais seulement des expériences. Une expérience est analysée selon un ressenti, donc une perception émotionnelle d’une réalité. Si je comprends à l’avance ce que cette expérience peut provoquer chez moi, en termes de bien-être ou de changement positif, alors j’achète. Simple ! Le marketing doit expliquer, mettre en scène, en évidence, cette promesse positive en respectant les valeurs du client, en étant limpide et transparent sur la mission de la marque et en racontant une histoire que l’on pourra partager.
Il ne s’agit donc pas du tout, de confondre le marketing avec l’élaboration d’un site internet, de fiches produits ou de contenus à publier sur Linkedin. Vraiment pas !
Mais revenons à la question de Gabriel sur l’utilité contestée du marketing. Certes, l’auteur nous prévient qu’il serait dangereux de négliger le marketing, mais est-ce suffisant ? Le débat n’est-il pas ailleurs ? J’aimerais que l’on dépasse le qualificatif ‘utile » pour prendre un peu de hauteur. Car si nous restions au niveau de l’utilité, on peut aussi bien revenir au concept établi dans les années 70/80 sur la réponse au besoin, par Philip Kotler (et pourquoi pas aussi les 4P). Bon, si vous en êtes encore là, n’allez pas plus loin dans cet article et mettez-vous tout de suite à la lecture de « Tout savoir sur le marketing émotionnel » (cf la rubrique les livre sur ce blog).
Pour ceux qui défendent cette version utilitaire du marketing, rappelons que l’utilitarisme est une thèse soutenue par John Stuart Mill (et avant lui par Jeremy Bentham) en plein essor du capitalisme issu de la révolution industrielle du 19ème siècle. Les pires agissements du capitalisme libéral ont trouvé là une justification facile. Tant que c’est utile à mon business, je peux bien inonder la planète d’emails ou de propositions commerciales, et aussi délocaliser, détruire l’Amazonie, les ressources mondiales de matière première rares, ou encore imprimer des prospectus d’enseignes de grande distribution par milliards ! Pourquoi pas ? Parce que les clients n’en veulent plus ! Ils achètent selon leurs convictions et leurs émotions.
Si vous aviez déjà conscience du fait que nous n’avons plus de besoin, vous comprenez qu’une des missions du marketing est de créer l’envie (voire du désir) chez le futur client. Dès lors, vous admettrez plus facilement que l’utilité du marketing ne mérite pas d’être débattue. Car quel autre département de votre entreprise pourrait bien créer le désir ou l’envie ? Qui pourrait créer une relation durable avec vos clients sans autre objectif que de leur apporter le meilleur service possible, de les accompagner dans toutes les étapes de leur parcours client et de les encourager à partager leurs préférences autour d’eux ?
Les commerciaux, dites-vous ? Oui pourquoi pas ! Mais pour y parvenir, il faudrait commencer par ne plus les intéresser à vendre coûte que coûte. Il faudrait sans doute les former à la bienveillance (faire le bien pour autrui), et non plus les gaver d’argumentaires mirifiques, ni de techniques de vente méprisant totalement l’humain en face d’eux. C’est peut-être ce que mon ami Philippe (@estocadaPhil ), dénomme un commercial 2.0.
En admettant que cela soit possible, il reste une attente que les entreprises sont en droit d’avoir face aux marketers : qu’ils / elles définissent la mission et imaginent les moyens de la déployer, de la raconter d’une manière à ce que la marque en devienne extraordinaire et unique. Si le marketing accomplit cela, il n’est pas seulement utile, il est indispensable. Sans marketing, il n’y aurait pas de marque, ni de vision du client au-delà du simple bon de commande ou des objectifs de chiffres d’affaires. Le marketing porte la vision de l’entreprise et doit rassembler toutes les forces vives autour de lui, commerciaux compris. Le marketing n’est pas une fonction, il est une inspiration dépasser la fonctionnalité des produits ou des offres.
Faire du marketing, c’est d’abord inspirer les gens à vivre de belles expériences. Si ce n’est pas utile, c’est en tout cas, ce qui contribue au bonheur de tous.
Merci Gabriel d’avoir inspiré ce débat ! 😉