Il y a tant de parcours, de profils différents dans le monde du marketing que je côtoie depuis 30 ans. Il y a tant de choses à lire aussi sur cette « matière » vivante et tellement peu considérée. Que dire du nombre de contenus écrits par les mêmes marketers, un volume si colossal qu’on devrait inventer des usines de retraitement de déchets pour éliminer le surplus. Alors quand Karine nous propose un vidéo d’un TedX récemment enregistré en Belgique, d’un jeune homme bien comme il faut défendant la poésie de la jeunesse, je me demande pourquoi nous avons eu tant de mal à aimer la lecture de romanciers, d’écrivains de théâtre ou d’essais et plus encore de poête ?
Est-ce réellement la faute de nos enseignants, de ceux qui nous ont dit de lire tel ou tel texte, de l’apprendre et parfois de le réciter ?
J’ai l’impression que le principal écueil que rencontre l’enseignant chargé de nous apprendre à lire les auteurs de la littérature française (mais aussi étrangère) c’est d’avoir un point de vue et d’attendre de nous que nous en ayons un aussi, relativement semblable de surcroit. Or il se trouve que chacun d’entre nous dans la classe vit une histoire différente à partir du même récit. Il est évident que nous n’aimons pas tous Emma Bovary, ni ne comprenons forcément les ardeurs de Phèdre à l’égard de son beau-fils, sans parler des déboires de cette pauvre Eugénie, promise à l’amour de Charles, fille d’un avare sans coeur et finalement abandonnée là au bout du chemin… Je ne me souviens plus vraiment de l’ennui que j’ai éprouvé alors pour ce type de lecture. Forcé d’ingurgiter des pages et des pages de littérature d »une qualité irréprochable mais aussi peu séduisante qu’un aquarium sans poisson.
Car pour aimer lire, il faut aimer les personnages. Il faut s’imaginer ce qu’ils sont, ce qu’ils vivent et ressentir à travers leurs aventures des émotions vives. Faudrait-il alors nous éveiller à cette intelligence émotionnelle ? N’est-elle pas indispensable à l’heure de prendre en main les pages d’un récit palpitant, à l’heure de rougir à la perspective d’un baiser interdit, de frémir aux sons des épées s’entrechoquant ?
Nous n’avons pas aimé lire à l’école parce que nous n’avions pas compris que le but de la lecture n’était pas d’apprendre un style un auteur, une vision du monde, mais bien seulement de vivre dans l’univers des héros, de nous projeter hors de nous-mêmes dans notre propre imagination.
Aujourd’hui quand tu lis ne serait-ce qu’un article de blog, tu dois te laisser aller à ne plus être toi. Tu deviens le temps de quelques lignes, ce personnage imaginaire que l’auteur te propose soit de suivre, soit de jouer jusqu’à la fin de son texte. Et c’est précisément cette liberté inouïe qui te pâlit et t’incite à lire encore et encore.
Merci Félix Radu pour cette très belle conférence et cet hommage à la poésie naturelle qui en chacun de nous et qui n’est jamais une question de style. L’imagination est à chacun et chacune.