Vraiment, il y a des mots qu’on ne devrait plus employer aujourd’hui. Lorsque des sociétés spécialisées dans l’Expérience Client publient des tribunes, infestées de mots tels que la rétention des clients, j’ai du mal à ne pas bondir de ma chaise. Quand allez-vous arrêter de croire que l’on pourrait « retenir » les clients ? Ou les rendre « captifs » ?
Certes, ces articles de fond (qui envahissent nos boites mail ou nos comptes sociaux), proposent d’analyser les données émises par les clients lorsqu’ils visitent un site e-commerce et, qu’en général, ils en partent sans aucune transaction. Certes, on pourrait, voire on devrait se poser la question du pourquoi ont-ils abandonné ou interrompu leur parcours ? Bien sûr, les plus « malins » voudraient plus tard, les retargeter…
Voilà ce qu’en disait Antoine Ballerin, le directeur France de Qubit : « Les clients citent les frais de port cachés et un processus de paiement compliqué comme les raisons principales de l’abandon. Cependant, les visiteurs peuvent aussi avoir trouvé une alternative à ce qu’ils cherchent ailleurs, ne pas avoir trouvé suffisamment d’information produit, avoir quitté le site car ils étaient simplement distraits par autre chose ou ne pas encore prêts à sauter le pas. Il est important de réaliser qu’un visiteur peut visiter un site et rentrer dans son tunnel de vente sans avoir l’intention de finaliser son parcours sur ce même site. Savoir qui sont ses visiteurs, analyser et comprendre leur comportement, et estimer à quel moment ils quittent son site peut permettre à l’e-commerçant d’en identifier les raisons précises. »
Autrement dit, cher Antoine, il y a une multitude de raisons d’abandon, et probablement chaque visiteur aura la sienne. Oui ! je suis d’accord ! Chaque individu étant unique, ses raisons de vous quitter sont les siennes et vous n’y pouvez rien. Enfin, vous pourriez améliorer le design de l’expérience client de votre site, il n’empêche que si son chat vient à sauter sur ses genoux, votre client passera à autre chose et n’achètera pas votre produit. Ok ?
Alors lorsqu’on imagine encore un parcours client basé sur une expérience linéaire et figée sur une échelle temps que personne n’envisage sérieusement aujourd’hui, de qui se moque-t-on ? Qui peut croire que le client suit un long fleuve tranquille de son recrutement jusqu’à sa rétention ?…
« C’est dans cette optique que la collecte des données quantitative et qualitative des visiteurs anonymes ou identifiés est une pièce maîtresse dans la quête d’amélioration de la rétention client » insiste Antoine, fort de ses 25 ans d’expérience.
Mais il n’est pas le seul ! Chez Experian, on justifie le recours à l’analyse des données par ce magnifique schéma du 20ème siècle. Et pourtant, le monde bouge…
J’ai beaucoup de mal à comprendre que l’on se réfère au passé pour tenter de résoudre des situations actuelles. Lorsqu’on constate que les deux réseaux sociaux qui progressent le plus en France sont ceux qui proposent des expériences instantanées et éphémères, il devient urgent d’admettre que plus rien n’est linéaire. Le parcours client est de plus en plus chaotique et rapide. Il passe d’un point de contact à un autre en un instant, d’un site à une Appli en moins d’une seconde. Je peux parfaitement acheter mon billet de train en 2 secondes et si j’abandonne cet achat, c’est parce que finalement le covoiturage m’ira bien, ou que ma cousine pourrait se joindre à moi et que je n’ai pas son agenda. Un tas de raisons que votre site ne comprendra pas, même avec tout un arsenal d’analytics ! Penser que vous pourriez me retenir sur votre site, relève d’un très (trop) vieux fantasme du marketing : le contrôle de mes décisions.
Les clients décident et n’ont pas envie que l’on entrave leur liberté de choix et d’action. Cela n’a rien à voir avec leur fidélité ou leur infidélité. Croire que la rétention améliore la fidélité est une folie moyenâgeuse !
Non vraiment, je crois que vous devriez passer à autre chose ! Définitivement ! Parce que la data est tellement énorme et difficile à analyser, vous ne devriez pas vous en servir pour de mauvaises raisons. La seule chose qui intéresse vos clients, ceux qui vous fournissent la data, c’est que vous trouviez le moyen de leur proposer tout de suite, ce qu’ils souhaitent.
Après ? Ils seront certainement partis ailleurs…
Merci d’avance !
Je trouve qu’avec la digitalisation, les relations clients se sont développé très vite et que les stratégies des entreprises ne sont pas totalement adapté à ces changements.
Certes la vitesse d’adaptation des entreprises est un véritable point de différenciation pour les années à venir. L’humain s’adapte toujours à son environnement ; aussi avouer que l’entreprise ne réussit pas à suivre, c’est avouer que l’entreprise n’est pas tellement humaine (ni dans sa vision, ni dans son organisation et surtout, ni pour ses managers)… Merci pour cette précision !