Je suis un fidèle supporter de la MAIF et pourtant je n’en suis pas le client. Paradoxe de consommateur et surtout peu d’appétence pour le changement de contrat, les démarches et même les assurances en général. Vivons dangereusement ! #oupas
Pascal Demurger se multiplie, se démène pour expliquer à tous, en commençant par ses confrères que l’entreprise doit avoir une mission sociale, une raison d’être tournée vers les autres depuis longtemps. Livre, interviews, conférences, sont relayées et au sortir d’un confinement historique, en regardant la crise économique arrivée avec la nonchalance d’un touriste bronzant sur une plage thaïlandaise, les marques pensent tout simplement à relancer la machine avec les mêmes promesses marketing qu’avant ! En voiture Simone, et nous voilà revenus au pays des merveilleuses promotions à tout va, en attendant les soldes. Ainsi dans la grande distribution, les prospectus, les mises en avant ont ouvert la porte aux produits spécial covid-19 dans lesquels tu pourras trouver ton bon vieux canard wc ! Ah bon ?! Il est spécialisé pour la lutte contre les pandémies ton canard ?

Dans sa récente interview pour Usbeketrica, le patron de la MAIF s’inquiète à juste titre de ce retour dans l’urgence aux pratiques les plus folles qui ont poussé les consommateurs à trop consommer et, sans doute, à dégrader la planète comme jamais dans l’histoire de l’humanité. Certes, il faut penser à vite renflouer les caisses afin d’éviter la casse ! Mais si 50% des marques de luxe sont amenés à disparaitre, ne serait-ce pas parce que le temps n’est plus au superflu ? Le temps n’est plus aux dépenses futiles, et la réflexion vaut aussi bien pour tous ceux qui consomment déjà en regardant à la dépense. Se faire plaisir restera un principe directeur de l’homo consumerus mais pas avec n’importe quelle conséquence pour les autres et notre environnement. Il est essentiel de s’en convaincre. Notre attention portée aux autres peut prendre le pas sur notre attention portée à nous et notre nombril. C’est même parce que nous avons eu peur pour nous, que nous espérons que les autres vont s’en sortir. Or quand on est un assureur, pourrait-on avoir pour mission d’éviter tout dégât, tout sinistre, plutôt que de faire de savants calculs pour facturer la prise en compte d’un risque (en conservant une marge confortable comme les 13 milliards de profits annuels des assureurs français en témoignent) ? Ainsi à long terme, un client qui ne subit aucun incident sérieux dans sa vie est un client heureux et satisfait de son assureur, et donc fidèle par gratitude. Un choix difficile certes mais un choix responsable d’abord !

« Si l’autre, c’est le client, « porter attention à l’autre », c’est par exemple, de bonne foi, savoir préférer l’intérêt de son client à l’intérêt immédiat de l’entreprise. Concrètement, pour la MAIF, cela veut dire accepter, par exemple, de ne pas vendre un contrat à un client qui serait pourtant prêt à l’acheter parce que l’on considère que ce contrat n’est pas idéal pour lui. À long terme, c’est un modèle gagnant, parce que c’est comme cela que l’on fidélise des clients. Mais basculer sur ce mode de raisonnement est complexe, puisqu’il suppose, là encore, de renoncer à un bénéfice immédiat au profit d’un bénéfice collectif qui s’exprimera à plus long terme. » Pascal Demurger – MAIF
Le temps est au temps long ! Vraiment ? Le temps est au renoncement face au bénéfice immédiat (c’est exactement la philosophie de Jazz Bezos depuis le lancement d’Amazon). Je suis convaincu que les bénéfices à long terme sont les seuls qu’une crise imprévue et imprévisible ne puissent remettre en cause, Je suis également convaincu qu’un client fidèle traverse les crises sans encombres et ne renonce pas à ses marques préférées. Au contraire, en situation périlleuse, il revient naturellement vers ses zones de confort et donc vers ses marques préférées. Il y trouve ce réconfort indispensable après un traumatisme cruel et c’est pour cette raison là que nous retournerons dès aujourd’hui sur notre terrasse de bistrot préférée, comme nous aurons voulu apporter notre soutien à nos commerçants fidèles et toujours là pour nous, en toutes circonstances. C’est une question de temps long !
Dans l’urgence, le consommateur fait ce qu’il peut et tente de sauver les meubles. Mais dès qu’il a le temps, dès qu’il retrouve son rythme, il fait le choix de l’attention sincère. La marque, et au-delà, l’entreprise devrait le comprendre. Le temps est précieux. Il est un élément de différenciation crucial pour le client. Pas uniquement dans le temps de réponse, dans le gain de temps après lequel courent tous les passionnés de l’expérience client digitale ou physique (le temps n’est pas le même partout); Qui aurait imaginé faire la queue sur un parking avant de pouvoir entrer dans un magasin (et ce pendant près d »une heure parfois) ? Avoue cher.e lectrice.teur qu’il faut être motivé ! et motivé par quoi exactement ? par cet achat qui nous était refusé pendant plusieurs semaines ? ou plutôt par l’excitation d’un bonheur « normal » retrouvé ? par l’anticipation d’un moment de plaisir à venir dans cet espace d’expériences que l’on a hâte d’explorer à nouveau ?
Le temps effacera nos mauvais souvenirs. Au contraire, le temps qui nous tient éloigner de ce que nous aimons, renforce cet amour et nous stimule à aller de l’avant, vers cet avenir souriant que génère la fidélité. Les marques sont autant de traces émotionnelles inscrites dans nos mémoires. Elles disparaissent avec le temps, elles sont alors enfouies loin dans nos cerveaux. Pourtant certaines refont surface avec opportunisme, justement lorsqu’on les croyaient perdues. Quelle joie de les retrouver !
L’attention sincère qu’elles nous ont porté avant vaut bien que nous leur signifions notre fidèle attachement aujourd’hui et demain.
PS. :et puis dans ma recherche d’un illustration pour la fidélité dans le temps, je retombe par la magie du référencement sur un ancien article inspiré par Jean D’Ormesson dont je te livre en extrait ce poème d’Aragon… #lovefirst
C’est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m’en irai sans avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces matins d’incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes
Il y aura toujours un couple frémissant
Pour qui ce matin là sera l’aube première
Il y aura toujours l’eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n’est le passant
Je dirai malgré tout que cette vie fut telle
Qu’à qui voudra m’entendre à qui je parle ici
N’ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle » – Louis Aragon