Est-ce vraiment une question de marketing ? Je m’interroge en suivant les aventures de ce personnage drolatique et atypique qui porte un double prénom comme patronyme. Jouant sur l’ambiguïté ou l’égalité des sexes, Philippe Katerine est-il ou est-elle genré.e ? Certes nous l’avions vu dans l’eau du grand bain, sans artifice au milieu de mâles se prenant l’espace d’un ballet aquatique pour les sirènes de la mixité à la recherche d’une médaille du mérite et de la reconnaissance populaire. Certes, lorsqu’il chante aimez-moi, aimez-moi (de mon vivant) parce que la mort rend les gens beaux, on comprend que le type a un gros problème de moi.
Et ce n’est pas la première fois ! Car lorsqu’il nous déclare j’aime être stone avec toi, on frise le délire propulsé par des substances illicites. Bref ! Le monde est rose pour Philippe et c’est tout ce qui compte.
Alors le Bon Marché, s’empare du phénomène et invite Katerine à tout repeindre en rose, et pas seulement son catalogue du printemps. Pourquoi ? Pourquoi faudrait-il en parler dans une semaine où je crains que les droits des femmes soient médiatiquement écrasés par des chars sans fleurs ni trompettes ?
Parce que je trouve l’initiative osée et remarquable. Si je ne suis pas fan de Philippe le chanteur-compositeur , je lui reconnais un talent immense pour ce mettre en scène. Scènographiquement parlant il s’impose. Le voilà transposé en monsieur Rose, une sorte de personnage chewing-gum tout rose, tout rond, tout en sucre (pour les gourmands qui le verraient en bonbon Haribo). Une belle idée qui arrive juste dans le bon timing pour tenter de nous rafraichir les neurones dans une période atrocement noire et rouge. Bravo donc au Bon Marché pour avoir osé ce que d’autres ne feront jamais.

Finalement le marketing c’est ça, vu par Katerine ! Lancer un courant autour de tout ce qui est mignon et rose : le mignonisme ! EN allant rue de Sèvres, on pourra admirer des « croutes » de l’auteur « patraque » comme s’amuse à le qualifier l’Obs dans un article qui finit par exprimer une certaine déception à voir l’artiste se muer en vendeur de chiffons et d’objets ridicules. Mais l’effet de mode est ailleurs. Le caractère transgenre de Philippe s’étend au-delà du rose comme couleur mignonne. Etre mignon, c’est so cute ! Cela pourrait séduire une clientèle en recherche d’émotions roses en ces temps cruels. Des femmes tu crois ? Et voilà ! On tombe vite dans le panneau (à peine publicitaire) dès lors qu’il s’agit de trouver une explication à ce choix colorimétrique. Pourquoi le bleu ne serait-il pas mignon lui aussi ? Ou le jaune ? Ou le bleu et jaune (ah non… trop actuel) ?
Un Katerine mou et rose s’est donc installé pour plusieurs semaines dans ce temple de la consommation bon chic bon genre qui continue d’inspirer des réflexions d’un autre âge. J’aime cette audace artistique à contre-courant, même si je ne suis pas certain que le message soit compris de la même manière par tout le monde. Pas du tout.
Demain il sera temps de changer de marketing. Pour l’instant, voyons si la vie est aussi rose que Katerine l’imagine…