Intuitions
Laisser un commentaire

Je suis prête à souffrir pour des instants de bonheur #oupas

Lorsqu’elle m’a dit ça. Panne ! Silence embarrassé. Panique dans mon cerveau. Prête à souffrir ? Ne me dis surtout pas que tu aimes ça, mon choux…. C’est quoi ta vision d’une expérience heureuse ?

Tu reprends ta respiration, tu essuies cette gouttelette de sueur qui perle sur ton front, et tu réfléchis en marketer émotionnel, pour tenter d’analyser ce bonheur paradoxal (merci Gilles Lipovetsky). Le client est-il prêt à souffrir pour vivre un moment de bonheur avec toi, ta marque, ou ton produit ? Evidemment ! Il se perd sur la toile, courre dans un magasin surabondé, se rue dans le métro pour l’ouverture des soldes, fait la queue pour payer, se rend chez l’épicier sus la pluie pour retourner ce qu’il a commandé en trop, bref, il galère. C’est beau à voir. Vraiment ?

C’est intrigant de constater qu’il y a cette nécessité d’une tension pour mieux profiter du rebond extatique qui la suit. Dans nos relations humaines, nous valorisons ces ascenseurs émotionnels en soulignant que notre fidélité, notre résilience, en sortent grandies. Il y a des hauts et des bas, est une phrase facile dire. Est-ce aussi fluide à vivre ? Où se situe l’incertitude qui nous empêche de voir la hauteur de la prochaine vague ou la profondeur du prochain creux ?

Alors dans l’expérience client, même si nous sommes fascinés par le parcours sans couture, sans accroc, sans « pain point », le monde idéal. Mais dans la vraie vie, c’est autre chose. Il semble que plus nous effaçons tout ce qui peut peiner le consommateur, plus l’expérience risque d’être sans saveur. Aurais-tu apprécié de la même façon, ces deux minutes dans le grand huit sans les 30 minutes de queue sous un soleil de plomb ? Pas certain. Aimerais-tu autant ce jean slim que tu as mis deux heures à choisir après de multiples contorsions dans la cabine d’essayage un peu étroite et surchauffée, si on te l’avait livré banalement chez toi ? Auras-tu pris le départ de la mud race s’il n’y avait pas de boue et de sueur au programme ? Serais-tu à ce point dithyrambique sur ce nouveau chef étoilé, si tu n’avais eu autant de mal à trouver une table à réserver il y a deux mois ?

J’ai envie de te demander si toi aussi, tu aimes souffrir… un peu.

J’ai l’impression que tout ce qui sera lisse, sans aspérité, n’aura pas de prise sur notre mémoire, à l’image d’un match de foot sans but ou d’un film de Tarantino sans une cinquantaine de morts. Allez chez Amazon Go, est certainement très agréable la première fois. Mais après ? Tu trouves que j’exagère ? Alors pourquoi aussi peu de réelle fidélité chez les nouveaux consommateurs, pourtant nourris par des expériences d’une qualité jamais vue ? Nous sommes plus vite déçus sans doute. Ou jamais enchantés ?

Alors si tu veux bien souffrir, c’est pour ce bonheur qui te fuit. Je ne dis pas qu’il faut souffrir pour éprouver ce sentiment de plénitude. Je crois que peu de choses, trop peu d’objets, encore moins de moments sont susceptibles de générer cette extase. Disparue ? Pas forcément, mais sans doute portée trop haut, trop loin. Si tu vises trop haut, le risque est de noyer tout ce qui est à ta hauteur, dans une fade banalité. Apprécier les instants de bonheur, c’est se réjouir de peu. Pas d’austérité ici, mais un appel à la sobriété relative. Si nous quittons l’excès, si nous renonçons à la surenchère, nous valoriserons davantage le sourire de la caissière, la gentillesses du serveur, la générosité d’un baiser ou la gourmandise d’un regard.

Sans doute, l’attente de ces moments là, peut générer une tristesse exagérée dans ce contexte, alors qu’elle devrait nous maintenir dans l’excitation. Etre excité par l’envie de rejoindre l’instant ou de se laisser surprendre, c’est prendre le plaisir là où il est, partout. Aussi, je dirais aux marques qui cherchent cette expérience client magnifique, qu’elles ne valorisent pas assez ce qui est offert, ce qui est mis à disposition de leur clientèle, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Le client n’a pas assez conscience, de ce qui lui tombe dans les mains comme par magie et qu’il finit par considérer comme un dû.

Si chaque instant était vécu comme un micro-bonheur, tu souffrirais moins mon choux. Tu voguerais d’un instant à l’autre tel un papillon hésitant sur la couleur des pétales qu’il préfère.

Viens !

Cette entrée a été publiée dans : Intuitions

par

CEO Eforbrands Consultant / Speaker / Formateur / Auteur du Marketing Emotionnel Fondateur du Club du Marketing Emotionnel - Intervenant pour les MSc MBA Inseec Paris et l'ISCOM en marketing émotionnel, stratégies de fidélisation, relation client... Auteur des livres : Tout savoir sur Le Marketing Emotionnel aux Editions Kawa - nov 2013 La Fidélité, du chaos à la zone de confort aux Editions Kawa - Janv 2017 Marketing ZERO avec Philippe Guiheneuc, chez 1min30 publishing - juin 2021 Fondateur de Eforbrands et de LePartenariat Rédacteur du blog marketingemotionnel.com

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s