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La Chine et l’expérience client

Si je suis resté silencieux pendant un long mois, c’est aussi parce que je suis allé voir ailleurs. Vous voudrez bien m’en excuser, mais la curiosité est une dimension importante lorsqu’on prétend s’inspirer des expériences insolites et inattendues que l’on vit ici ou là. La Chine fascine de nombreux observateurs occidentaux et plus encore les marketers en mal de nouveaux débouchés, et ce depuis une vingtaine d’années. C’est environ le laps de temps qu’il aura fallu à sortir 1,450 milliard de chinois de la léthargie ou des campagnes, pour en faire des consommateurs extrêmement avancés dans leurs pratiques quotidiennes. Pour l’anecdote, j’ai failli croiser mon ami Philippe Jourdan, spécialiste des marchés du luxe et des cosmétiques en Chine (à Hong Kong pour être plus précis) et j’imagine qu’il y cherchait de nouveaux insights pour alimenter ses conférences et ses clients.

Premier constat édifiant : tout se passe désormais sur un smartphone (le plus souvent de marque chinoise). Les Apple Store sont plus nombreux à Shanghai ou à Hong Kong qu’à Paris et les boutiques des opérateurs et fabricants de téléphone chinois sont à tous les coins de rue. Dans le métro (climatisé) des grandes métropoles, aucune tête n’émerge, aucune conversation n’est audible, puisque tous ont les yeux rivés sur leurs outil de base, soit pour y visionner une vidéo, soit pour converser avec une myriade de correspondants digitaux. Dans les couloirs, dans les rues, partout, les gens marchent en regardant leur écran. Il en va naturellement de même dans les magasins ou les restaurants, puisque les commandes se passent en ligne et que le paiement est un QRcode à scanner en caisse et débiter directement sur le compte du bénéficiaire. Plus de banque, plus de cash dans les poches, un smartphone suffit pour vivre en Chine !

imitation chinoise

Deuxième constat : les marques sont omniprésentes. Toutes les marques ! Pas seulement LVMH ou Chanel, BMW ou Ferrari, mais toutes les marques venant d’occident, du Japon, de Corée et bien sûr de Chine. La compétition est folle, mais les espaces sont bien plus grands, les concepts de magasin plus high tech et si la communication est en anglais, c’est un simple effet de style puisque pratiquement personne ne maitrise la langue de Shakespeare ici. Ce qui est frappant, c’est que tous les marchés que l’on qualifie rapidement d’émergents chez nous sont en réalité déjà une évidence pour les chinois. Il faut avouer que la population cible est tellement énorme qu’il suffit sans doute d’ouvrir une boutique pour avoir une clientèle. Mais tout de même. Le chinois des rues est plutôt rustre, bouscule tout ceux qui sont sur son passage, doit faire face à des files d’attente partout et réellement se faire une place à chaque instant. Alors quand il entre dans un espace commercial, il respire (et pas seulement grâce à la climatisation). Les marques ont su adapter leurs produits au marché (semble-t-il) et les innovations comme la VR sont déjà intégrées, jusque dans la Cité Interdite à Beijing (on peut visiter virtuellement le site sous diverses conditions météos et notamment en hiver et à d’autres époques).

boutique dior.jpg

Troisième constat : la force de l’image. Tout semble être lié à l’image de soi, à l’instantané d’une photo ou d’un commentaire sur un réseau social. On vit en Chine en temps réel et il faut se réfugier dans un parc, un jardin isolé et contenant un temple par exemple, pour échapper au temps. Le présent est en train de sortir de terre dans chaque ville (là où n’existait qu’un pauvre village), les rues sont refaites dans la nuit, les agencements des magasins sont recomposés chaque soir, pour le lendemain, comme nous l’avons vu à Shanghai. Tout est prévu pour que l’image du lendemain efface immédiatement et pour toujours l’image d’aujourd’hui. La Chine d’hier a disparu des étalages et des lieux de business. On construit en Chine plus de tours que n’importe où dans le monde, et le fast train (plus rapide que notre TGV) accueille une business classe que seuls les avions proposent à nos voyageurs européens. Prétendre qu’il y a du monde à la gare de Lyon au mois d’août est d’un seul coup ridicule lorsqu’on arrive dans celles de Beijing ! L’image de la Chine est en mouvement ; elle est dans le mouvement devrais-je écrire. Tout est mouvant, tout en est-il flou pour autant ? Parce qu’au-delà de l’incroyable fascination pour le selfie des citoyens du dernier pays communiste au monde, le contrôle de l’image est permanent. Les caméras sont partout ! Les réseaux sont sous contrôle de l’Etat. L’image du pays ne saurait être troublée par le déferlement du business…

Le client est-il satisfait ? Pourrait-il être fidèle dans ses conditions ?

Je m’interroge sur la question de la fidélité en Chine. Existe-t-elle seulement ? Au-delà d’un engagement patriotique sans contestation possible ?…

(à suivre)

Cette entrée a été publiée dans : expérience client

par

CEO Eforbrands Consultant / Speaker / Formateur / Auteur du Marketing Emotionnel Fondateur du Club du Marketing Emotionnel - Intervenant pour les MSc MBA Inseec Paris et l'ISCOM en marketing émotionnel, stratégies de fidélisation, relation client... Auteur des livres : Tout savoir sur Le Marketing Emotionnel aux Editions Kawa - nov 2013 La Fidélité, du chaos à la zone de confort aux Editions Kawa - Janv 2017 Marketing ZERO avec Philippe Guiheneuc, chez 1min30 publishing - juin 2021 Fondateur de Eforbrands et de LePartenariat Rédacteur du blog marketingemotionnel.com

5 commentaires

  1. carine0974 dit

    Bonjour Patrice,

    Lorsque j’ai lu votre deuxième paragraphe, j’ai vu le dessin animé « Wall E ». Il ne manque plus que les transports autonomes pour y arriver. Hallucinant!

    Je vous mets un extrait: https://www.dailymotion.com/video/x3a2j9d

    Merci pour le partage
    Carine

  2. Gaberscek Selva dit

    En parlant de l’utilisation des smartphones, il est amusant de remarquer les consignes inscrites aux extrémités des escalators et sur le sol : « attention, levez les yeux de votre téléphone »! De plus, les envois de messages vocaux (plutôt qu’écrits, sur wechat) sont plus démocratisés qu’en France (sur whatsapp par exemple).
    Deux expériences qui m’ont marqué avec les QRcode: la première, perdue dans la campagne chinoise, je me rends à un stand de fruits coupés composé de deux tréteaux et d’une planche, tenu par une vieille dame, et je constate que je peux payer via un QRcode, imprimé sur une feuille A4, scotchée dans le coin de la planche de bois. La deuxième, dans la résidence où je me trouvais, il fallait scanner le QRcode disponible sur chaque machine à laver pour payer le lavage. Tout ça biensur via le portefeuille de l’application Wechat, rempli par le montant des enveloppes rouges du nouvel an, envoyées par mes amis chinois.
    La question de la fidélisation est en tout cas une excellente réflexion! Un exemple de fidélisation que j’ai observé il y a presque 3 ans (et à la vitesse où les choses changent en Chine…): à Hangzhou, si vous réglez vos commandes Starbucks avec une carte de la banque ICBC, Starbucks vous offre une boisson/ un gâteau tout les 20€ d’achat.

  3. Merci beaucoup pour ce commentaire riche et illustré de beaux exemples d’expérience de paiement mobile ! A noter que Wechat est un choix et que Alipay mais aussi Applepay sont disponibles et très utilisés…

  4. Merci Carine pour ce commentaire et cette très belle référence à un film magnifique ! Wall E était tellement émouvant aussi…

  5. expertchine dit

    Très bel article, bonne observation ! J’attends la suite 🙂

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