C’est parti ! J’ai laissé tout cela derrière moi. Je le pourrais mais ce serait tout gâcher, alors je ne regarde pas en arrière. Quand tu te lances dans un voyage, il faut fixer ton regard sur l’horizon. C’est vrai que pour le moment tu ne vois rien là-bas. C’est surement trop loin. Combien d’heures, combien de jours te séparent encore de ce que tu imagines être ta destination ? La beauté du voyage n’est-elle pas dans cet imaginaire temporel ? Toi qui a un peu d’expérience, tu sais bien que l’imprévu, l’impondérable viendra perturber ton calendrier. Et peut-être même modifiera-t-il ta route ou ton point d’arrivée ?
Alors tu te prépares. Tu te fixes des points d’étape, des règles à suivre pour ne pas sortir de la route, tu surveilles ton tableau de bord, tu vérifies tes moyennes. Tu les notes dans un carnet de voyage, un livre de bord qui plus tard sera la preuve de la réalité de ce déplacement dans l’espace, de ce temps consacré à aller autre part, de tes efforts et de tes difficultés aussi. Cette encre noire qui ondule, se crispe au gré du vent contraire et qui sèche au soleil, témoigne de ta vitalité. Le voyage sans cela serait à peine crédible, filerait dans un ciel peuplé de nuages et aussitôt remplacés par d’autres. Et puis tu as peur d’avoir oublié quelque chose. En passant par là, tu devrais y arriver, non ?

C’est ce qui se produit aussi pour toi qui fait du marketing. Si tu as des indicateurs (d’une performance qui mériterait qu’on s’y attarde et nous verrons plus tard si le voyage nous y autorise), c’est précisément pour qu’ils indiquent aux autres le chemin parcouru. Non qu’ils voudraient marcher dans tes pas, mais parce que c’est en te suivant de loin qu’ils peuvent comprendre où tu vas. Si tu es passé par là aujourd’hui, on peut sans doute s’attendre à te voir ici demain. Trajectoire et plan sur la comète s’étalent sous nos yeux éblouis par le temps. Mais vois-tu, lorsque je pars, je crois inutile de divulguer chaque instant, chaque hésitation, chaque carrefour et chaque décision finalement prise. J’y vais. Je ne te demande pas ni maintenant, ni jamais, d’en faire autant. Pourquoi voudrais-tu te glisser dans mon sillage ? Ton voyage est au moins aussi passionnant que le mien, ne crois-tu pas ?

Les notes sont ce sillage. Les indications griffonnées, les pancartes fléchées, les bornes atteintes, sont des messages laissés derrière à qui voudra bien les trouver. Comme ce chapelet de cailloux tombés de la poche au long du chemin. C’est un moyen de rembobiner le fil en espérant qu’il nous conduise quelque part et pourquoi pas jusqu’à toi. Il y a une forme de peur qui s’empare du voyageur à l’instant où il pense qu’il pourrait disparaitre sans laisser de trace. Alors il marque ses étapes, son passage à tel ou tel endroit comme un chien qui pisse sur le pas des portes. Au moins, on saura un jour ou l’autre qu’il était là.
Ah la splendeur des tableau de bord ! Qu’ils sont rassurants et animés ! Je n’imagine plus le marketing sans tableau de bord. Un peu comme ce pilote de jet qui examine frénétiquement ses cadrans alors que son avion est entièrement autonome dans son pilotage. Mais pourquoi ? Si je voyage, c’est certainement pour échapper à la certitude des chiffres et des coordonnées satellites ! Je veux sortir du radar, explorer l’invisible, me rendre de l’autre côté de la carte. Mince !
Et soudainement, tu t’assieds au bord du chemin, la tête dans les mains, le coeur sur l’estomac, les pieds immobiles. Tu réalises que voyager, c’est autre chose que de pointer des check points. Lumière ! Si tu découpes chaque étape en sous-étape, chaque avancée en pas puis en pieds, tu peux toujours les compter. Tu pourras te glorifier un jour d’avoir avancer, d’être à l’initiative d’un progrès. N’importe quel indicateur deviendra alors témoin de ton mouvement et tu l’exhiberas fièrement au prochain comité directeur. Parce que tu as cru à la théorie des petits pas, tu n’es pas allé bien loin.

Je t’invite à voir plus loin. A dépasser ton besoin de réassurance qui t’obligeas à consigner soigneusement, méticuleusement chaque progrès comme si tu surveillais la prise de poids d’un nourrisson et sa croissance sur la courbe de la normalité enfantine. C’est bien de la faire, mais avoue que cela ne te rapproche pas de l’horizon. Et bientôt, tu te demanderas quel est le sens de ce voyage entrepris, il y a déjà quelque temps.
Prévoir moins d’étapes, en changer selon l’intuition du moment, ne pas vouloir se souvenir de tout, sont des moyens de se perdre plus facilement. C’est justement ce qui m’inspire dans ce voyage. Car si l’on se perd, on découvre naturellement autre chose…
A plus tard…
PS : si tu as loupé le départ, rends-toi ici : https://marketingemotionnel.com/2022/02/03/le-marketing-est-un-voyage-1/ (tu ne toucheras pas 20 000 pour autant #jenesuispasunmonopoly)