Le désir est-il dans la possession d’objets ou dans l’appartenance sociale, l’intégration à la tribu ?
La vision tribale des clients de la marque change en effet les perspectives de la relation. Or nos comportements de consommateur sont très largement inspirés de comportement tribaux. Adoration de la marque pour les ambassadeurs, lieux de culte de la marque pour ceux qui fréquentent les concept store comme les boutiques éphémères, ou encore les « events » VIP, et bien entendu impatience affichée pour la nouveauté, la nouvelle collection de la marque. Autant d’attitudes révélant et regroupant les individus au-delà de toute considération économique (budget, âge, géographie, activité..) qui constituent le socle d’une existence sociale des marques.
Mais quelle définition du désir retenons-nous pour le marketing ?
Le désir est originel de toute relation humaine et donc sociale. Le désir est sensuel, le désir est charnel, le désir est passionnel dans ce qu’il projette nos perceptions du soi et du nous dans la relation à l’autre. Il en est de même pour les objets qui nous définissent. La valeur que nous leur attribuons est née dans le désir que nous avons eu de les posséder (et sans doute aujourd’hui de les utiliser, voire de les partager).
En prenant comme référence de marque tribale Harley Davidson, Benoit Heilbrunn, met en évidence le « rôle important de la marque dans la formation de l’identité individuelle des membres (de la tribu) et comme transformateur de l’identité collective ».
« Les marques seraient donc susceptibles de susciter des comportements qui outrepassent les attentes traditionnelles des consommateurs et notamment un désir de relation et de liens d’affection en rupture avec les rôles sociaux réifiés et les obligations sociales, un désir de connexion collective en réaction à ce qui peut apparaître comme dangereux ou conflictuel dans une société pluralisée et atomisée, un désir d’expérience d’un tout qui ait du sens, d’un sentiment d’appartenance à quelque chose qui nous dépasse pour vivre avec quelque chose de plus fort que soi et un désir de résurgence de traditions perdues ou érodées. »
Et si le client était en manque de désir ? Et si la marque ne s’attachant qu’à satisfaire ses besoins avait perdu toute désirabilité ?
Pourtant le membre de la tribu (ce fan sur Facebook, celui qui tweete ou qui instagrame l’actu de sa marque préférée) fait preuve d’une fidélité exclusive, d’un engagement fort, participe du recrutement de nouveaux membres et se porte volontaire dans l’accomplissement des rituels consacrant la marque. Tout ce que nous pouvons attendre de mieux d’un client !
Provoquer le désir est autrement plus difficile et passionnant que de répondre à un besoin. Donner du sens à la consommation est un impératif social ; reste à le désirer. Faisons-en un nouvel enjeu pour les marketeurs…